Gilles Mihalcean est né en 1946, à Montréal, où il vit et travaille. Référence en matière de sculpture (Prix Paul-Émile-Borduas, 2011), il s’implique dans le monde des arts autant comme artiste que comme auteur, commissaire et enseignant.
Ayant réalisé plusieurs œuvres d’art publiques, Gilles Mihalcean a tenu plusieurs expositions solos et ses œuvres figurent dans plusieurs grandes collections publiques et privées canadiennes.
Dans ses œuvres, Gilles Mihalcean accorde une place importante à la disposition des volumes dans l’espace à partir d’un emploi de matériaux variés. Son processus de création confère à ses œuvres un caractère narratif indéfini, ouvrant ainsi la possibilité à une multitude d’interprétations.
Description de l'oeuvre
L’œuvre Saint Thomas est une sculpture intégrée à l’architecture du pavillon de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, autrefois un couvent. Bâti en 1936, le bâtiment a été l’objet de nombreux travaux d’extension. La dernière rénovation, effectuée en 1998, a remporté un prix d’excellence en architecture et a donné lieu au concours, remporté par Gilles Mihalcean, dans le cadre du programme d’intégration des arts à l’architecture. Par sa forme, l’artiste a voulu calquer la succession de barrières qui compose déjà l’espace de la cour (murs vitrés, escaliers de pierre, surface gazonnée) pour respecter le caractère austère du lieu et son esthétique qui allie tradition et effets de transparence.
Il s’agit d’une sculpture verticale posée sur un socle de granit et composée d’un empilage de trois « couches », distinctes en leur forme et leur matériau. La partie la plus excentrée est constituée d’une grille de laiton, fabriquée dans la tradition des cloisons de ferronnerie d’art. Celle-ci veut rappeler le passé du bâtiment, en même temps que les lignes du nouveau plan d’architecture du pavillon. La partie mitoyenne est un grillage de feuilles d’acier inoxydable perforées, qui a pour effet de décomposer la forme intérieure et de l’aplanir telle une image numérisée qui s’anime au gré des déplacements du spectateur. La partie centrale, un volume fait d’époxy, a une apparence qui oscille entre une forme anthropomorphique et celle d’un objet technologique. Le soir, des lumières éclairent l’œuvre de l’intérieur et projettent son étrange silhouette sur les larges fenêtres du pavillon.
Elle s’inscrit, de par son titre, dans la portion des sculptures de Gilles Mihalcean qui empruntent à l’art religieux. D’une part, son thème réfère à la figure biblique de Thomas en tant que saint patron des architectes et contribue ainsi à établir un lien symbolique entre l’œuvre et le lieu qu’elle occupe – soit la cour intérieure de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, qui abrite notamment l’École d’architecture. D’autre part, cette référence à Thomas se doit être mise en relation avec l’allure intrigante de l’œuvre, qui fait douter au spectateur de ce qu’il voit et de ce que sa structure grillagée renferme vraiment – un effet théâtral donc, qui rapproche l’attitude du spectateur de l’incrédulité de l’apôtre qui lui a fait toucher la plaie du Christ. Enfin, cette double référence contenue par le Saint Thomas de Mihalcean suggère également l’importance du doute dans le cadre d’une pratique responsable de l’architecture.